Essayez, en tant que simple commun des mortels, de connaître les chiffres de ventes de disques de votre idole. La première concernée, en toute logique, devrait être sa maison de disque. Or, à coup sûr, elle se réfugiera dans un silence justifié par le côté confidentiel d’un tel renseignement… quitte, en revanche, à communiquer à la presse des chiffres gonflés pour faire mousser telle ou telle star sur le déclin. C’est, en principe, contre cette anarchie que s’insurgeait le Top 50 officiel et la remise des disques d’or par des syndicats officiels (SNEPA, RIAA, etc…) qui distribuent les récompenses sur justification de la maison de disque. Hélas toutes les maisons de disques n’appartiennent pas obligatoirement à un syndicat.
Le marché du disque n’a cessé d’évoluer
En 1900, disparition du rouleau au profit du 78 tours… Années 50, disparition du 78 tours au profit du 45 tours… Années 70, affaiblissement du marché du 45 tours au profit de celui de l’album 33 tours… Dernière étape (en date, car on va sans doute encore assister à de nombreux bouleversements dans le futur ) l’arrivée fracassante du CD qui a fait disparaître presque totalement le disque de vinyle. Pour y parvenir, en France tout-au-moins, il a fallu un véritable concours de circonstances: la diminution du taux de la TVA (de 33,3% à 18,6% puis 20,6%) et l’accès du disque à la publicité télévisée. On ne saura jamais réellement combien de dizaines de millions de disques ont été vendus grâce au sticker « Vu à la télé ». Aujourd’hui, le marché s’essouffle, la moindre régression, si minime soit-elle, apparaît comme un véritable naufrage. Le téléchargement légal ou pirate fait craindre la disparition pure et simple du support matériel.
Avant l’âge d’or, le temps des chiffres gonflés
Au moment où les ventes de disques n’étaient pas encore monumentales, on avait coutume d’utiliser un calcul cumulé, comme l’indique cet article paru en 1967 dans « Spécial Pop » :
En principe on offre un disque d’or à toute vedette qui vend un million d’exemplaires d’un disque. Par disque on entend le simple ou single à un morceau par face. Pour les 33 tours que l’on considère comme équivalents à 6 singles, on offre le disque d’or non plus au millionième disque vendu, mais au millionième dollar rapporté par les ventes. Le problème des 45 tours doubles ou E.P. est plus complexe puisqu’on les considère comme un single et qu’il faut pour obtenir le disque d’or en vendre un million d’exemplaires, c’est-à-dire autant que les singles.
C’est toujours Spécial Pop qui suggère que le marché de la pop music, en France, en 1967, est plus modeste qu’on a voulu le faire croire :
Il est plus que probable que les très grands succès français n’ont jamais atteint des ventes de l’ordre du million, tout au moins dans la musique pop des idoles. Les publicités qui furent faites à une certaine époque sur certains artistes à propos de leur disque d’or ne sont que les résultats de l’addition pure et simple des ventes totales de tous les disques. Non pas des ventes d’un seul disque.
La crise du disque fut-elle aussi réelle qu’on le dit ? On peut s’interroger !
Dans les années 60, on parlait en terme de Disques d’argent et de Disques d’or. Trente ans plus tard, les meilleures ventes étaient récompensées par des Disques de platine et, pour un million d’exemplaires du même disque, par des Disques de diamant. Mais pour le quidam ces termes ne correspondent à rien de bien précis car d’un pays à l’autre, on comptabilise différemment ces ultimes distinctions. C’est logique, d’ailleurs : comment décerner un même Disque d’or dans des pays qui n’ont pas du tout le même nombre d’habitants ? Avec un million de disques vendus aux Etats-Unis, une chanson connaît un petit succès… tandis que le même nombre vendu en Belgique signifie qu’elle est entrée quasiment dans chaque foyer. Les procédés de comptage varient donc selon l’époque et selon le pays concerné. Quoiqu’il en soit, jusqu’à l’arrivée du téléchargement sur internet, les ventes ne cessèrent d’augmenter
Les origines du Disque d’or sont assez confuses
On sait de manière certaine que le premier chanteur à avoir vendu plus d’un million d’exemplaires d’un disque est Caruso . Mais à l’époque le disque d’or en tant que récompense n’existait pas encore. On ignore encore aujourd’hui à qui fut officiellement remis le premier disque d’or. En revanche, on peut raisonnablement penser que l’idée est née en 1905, lorsque la Compagnie Britannique du Gramophone offrit à Marie Hall, une violoniste extrêmement populaire, un bracelet constitué de sept petits disques en or symbolisant les sept succès qu’elle avait à son palmarès.
Les diverses distinctions
Prenons le cas de la France dans les années 90, où l’on continuait d’honorer différemment singles et albums :
– disque d’argent : 125 000 exemplaires d’un single
– disque d’or : 100 000 exemplaires d’un album, 250 000 exemplaires d’un single
– double disque d’or : 200 000 exemplaires
– disque de platine : 300 000 exemplaires d’un album, 500 000 exemplaires d’un single
– double disque de platine : 600 000 exemplaires
– triple disque de platine : 900 000 exemplaires
– disque de diamant : 1 000 000 exemplaires d’un album, 750 000 exemplaires d’un single
Mais depuis que la crise du disque est devenue une réalité et non plus un serpent de mer, ces chiffres ont été drastiquement revus à la baisse .
Enfin signalons que le show business créa le disque de rhodium spécialement à l’intention de Paul McCartney dont le 45 tours « Mull of Kyntire » battit tous les records de ventes, même ceux établis précédemment par les Beatles